Ceux qu’on appelle « « les saisonniers » ne sont pas forcément des jeunes, employés dans la restauration l’été, ou des étrangers recrutés pour les travaux agricoles. C’est aussi un statut à part entière de travailleur intermittent. Crise sanitaire oblige, ces salariés se sont retrouvés, avec le confinement, privés de toute perspective d’embauche.
Isabelle «fait les saisons» pour le même tour-opérateur depuis dix ans. Cette année, son contrat n’a pas été reconduit. «J’aurais dû commencer mon CDD autour du 15 avril en Grèce. C’était convenu comme ça, racontait-elle au mois de mai. Avec mon équipe de cinq personnes, on a appris que la frontière et l’hôtel étaient fermés. On s’est retrouvés sans nouvelles. Le club de vacances attend que la situation se débloque. Derrière le terme « saisonnier », il n’y a pas que des jobs d’été. Dans ma base, la moyenne d’âge n’est pas de 20 ans : on a tous entre 30 et 50 ans.»
Martin est directeur de club de vacances. Il se retrouve dans l’impossibilité d’embaucher tant que le volume de réservations ne se précise pas. «Mes saisonniers sont dans l’inquiétude et le désespoir. Ce sont de vrais drames humains, dit-il. On a souvent cette image du jeune saisonnier, mais ma responsable d’hébergement a 45 ans, mon ouvrier de maintenance en a 55. Ce n’est pas que de la main-d’œuvre, c’est un savoir-faire.»
Carole, quinquagénaire, est une saisonnière régulière du Carlton de Cannes. Elle est cheffe de rang dans ce palace de la Croisette. Elle aurait dû signer en avril.
Pour la plupart, impossible de prolonger leurs droits Pôle Emploi. D’autant plus que les conditions d’indemnisation se sont durcies avec la réforme de l’assurance chômage. Depuis novembre, pour faire valoir ses droits, il faut être en mesure de présenter six bulletins de salaire dans les vingt-quatre derniers mois, contre quatre dans les vingt-huit derniers mois auparavant.
Anne est la plus inquiète : «J’ai eu ma responsable au téléphone. Elle m’a dit que ça ne reprendra pas avant octobre, donc je n’aurai rien avant. Je ne peux pas postuler dans des restaurants, ils ne prennent que des jeunes.» Anne a 60 ans.