J + 11 du confinement
Que n’a-t-on dit encore sur l’épidémie de coronavirus ?… Rien. Tout est dit à longueur de journaux télévisés et d’émissions spéciales sur toutes les radios. On a revu et entendu dix fois les mêmes invités : médecins, professeurs, infirmières, urgentistes, ministres, même des médecins de province, c’est dire s’ils sont à cours ! Les médias ne savent plus vers qui se tourner pour avoir un témoignage inédit.
Pourtant il y a des gens qu’aucune télé n’invite, qu’aucun journaliste n’interviewe, qu’aucun reportage ne montre, à croire qu’ils sont épargnés par le virus : les habitants des cités.
Pas un mot ; pas une image. Et Dieu sait si on en voit des images et des interviews de gens confinés : des bourgeois dans leur appartement confortable, des artistes dans leur résidence secondaire, des collègues journalistes dans leur chez eux parisien, des étudiants plein d’imagination.
Et dans les cités, ça se passe comment ?… Pas un mot ; pas une image. Black-out.
Dans les barres HLM, on le vit comment, le confinement ? On sait pas. Ces gens-là n’existent pas. Des familles entières, souvent nombreuses, coincées dans leur appartement, entre les petits qui braillent, la mère qui essaie de retenir l’ado qui va rejoindre ses copains, et le père au chômage partiel devant la télé à fond ; ces familles, d’un coup, ne font plus partie de la France.
Ce chamboulement du quotidien, ils ne le prennent pas trop mal, les confinés relax des maisons de campagne ou les mères bien coiffées qui font faire sagement leurs devoirs à leurs enfants dans le salon (« après, mon chéri, on fera une séance de yoga pour se détendre… »). Et les largués de l’école ?… ils se connectent pour faire leurs devoirs ?… Les caïds du quartier, ils le prennent au sérieux, le confinement ?… On aimerait le savoir. Mais ça n’a pas l’heur d’intéresser les médias.
Quand les enfants des cités seront dans la rue pour faire brûler des voitures, alors là il y aura la presse, et on passera les images en boucle.