Polanski 2 – Haenel 0


Humeurs / dimanche, 8 mars, 2020

En 1996 est sorti un film assez drôle sur les relations de couple : « Delphine 1 – Yvan 0 ».

Le 28 février 2020 s’est joué un film beaucoup moins drôle : Polanski 2 – Haenel 0.

A l’issue de cette fameuse cérémonie des César qu’on attendait, vu le contexte sociétal et cinématographique, comme une confrontation entre agresseurs sexuels et victimes, prenant forme humaine sous les traits d’une confrontation Polanski-Haenel, on peut dire que la deuxième a largement perdu la partie. Avec elle, toutes les victimes.

Alors qu’on attendait, certes, un ou des prix pour le film J’Accuse, on n’attendait pas moins que soit mis à l’honneur son pendant : Portrait de la Jeune Fille en Feu. Il n’en fut rien, puisque parmi les plus prestigieuses récompenses (si tant est que les César soient une récompense prestigieuse), deux sont allées au film de Polanski et aucune à celui où joue Adèle Haenel.

Polanski 2 – Haenel 0.

Le film de C. Sciamma, encensé par bon nombre de critiques, y compris internationales, mais ignoré par le jury des César : si ce n’est pas une sanction, ça y ressemble fort. On a beaucoup relayé les réactions scandalisées qu’a suscité  le sacre d’un homme accusé de viols par une dizaine de victimes; mais on a beaucoup moins commenté cette « curieuse » absence de reconnaissance pour le Portrait de la Jeune Fille en feu (César de la meilleure photo par ailleurs).

CARTON ROUGE !! Exclusion !! L’arbitre a tranché. Or c’est ça, le plus gros scandale de la soirée.

Comme si, dans ce match truqué, plébisciter le film de Polanski ne suffisait pas, on sanctionne, on étouffe l’adversaire en passant sous silence le film d’Adèle Haenel, que tout le monde attendait comme meilleure actrice.  Droit au discours confisqué !… « Ta gueule ! », parodirait Virginie Despentes.

Une fois de plus : murées dans le silence.

Toutefois, il faut bien admettre que, entre la verve de la présentatrice, la controverse du palmarès et la sortie majestueuse d’Adèle Haenel, tout ceci nous a fourni, comme on dit, un grand moment de télévision, et, toujours selon Virginie Despentes, « la plus belle image depuis 45 ans de César» : Adèle, dos (nu) au public, fière, la main dressée, seule contre tous, mais plus forte qu’eux tous.

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